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Typologie et rôles des haies dans le CANTAL

Sylvie MONIER,

Ingénieur Chargée de Mission Haies au Centre Régional de la Propriété Forestière d’Auvergne
1  rue du Théâtre, 15100 Saint-Flour.




Les haies et autres arbres hors forêt (arbres isolés, bosquets, alignements d’arbres) font partie intégrante de notre patrimoine rural. Façonnées par l’homme depuis des siècles, elles diffèrent d’une région à l’autre et contribuent ainsi à la diversité des paysages. Cette diversité se traduit au niveau de leurs formes (haies basses, haies hautes, alignements de frênes émondes,...) et leur densité (on parle de réseaux bocagers lorsque les haies sont interconnectées et nombreuses sur un territoire).

Le Cantal est un bon exemple de diversité de haies : les véritables réseaux bocagers sont majoritairement situés à l’Ouest et dans les vallées des Monts du Cantal. Ces réseaux créent un paysage dit « intime » car la vue ne porte pas loin compte tenu de la présence des haies. L’Est Cantal est en revanche beaucoup moins dense en haies et on ne peut plus parler de réseaux bocagers, mais de haies sporadiques qui maintiennent un paysage ouvert où la vue porte loin.

         

Réseaux bocagers a Cheylade et a St Martin sous Vigouroux.

Outre ces rôles paysagers et patrimoniaux, les haies jouent de nombreux rôles agricoles et environnementaux qu’il est indispensable de prendre en compte aujourd’hui. Dans le Cantal, de nombreux organismes (le Conseil Général du Cantal, le Parc Naturel Régional des Volcans d’Auvergne, la DDAF, la Chambre d’Agriculture et les Chasseurs du Cantal) ont pris conscience de la nécessité de préserver les haies depuis longtemps car c'est en 1983 que la première haie a été plantée. En 1996, une Mission haies a été créée, à l'initiative de ces mêmes organismes. Cette mission haie est rattachée au Centre Régional de la Propriété Forestière d'Auvergne. Ses missions sont les suivantes : Préserver le bocage dans le cadre des remembrements (bourse d’échanges d’arbres, sensibilisation), Organiser des programmes de plantation de haies champêtres (conseil, coordination des travaux, commandes groupées), Constituer un appui technique et une base de conseils pour l’entretien moderne des haies, Végétaliser les abords de bâtiments agricoles, Sensibiliser sur des haies urbaines de qualité (lotissements, zones artisanales…), Etudier et expertiser les réseaux bocagers, Sensibiliser et former sur le bocage.

Le présent document donnera un aperçu de la diversité des haies du Cantal et des rôles qu’elles jouent. Deux parties constituent ce document :


- Typologie et diversité des haies du Cantal
- Rôles des haies dans le Cantal





PARTIE 1 : TYPOLOGIE DES HAIES DU CANTAL.


1 - LES RESEAUX DE HAIES BASSES TAILL2ES ANNUELLEMENT ET PONCTUEES DE GRANDS ARBRES.

Ces petites haies basses carrées (inférieures à 2m de haut), ponctuées d’arbres de haut-jet, sont typiques du bassin d’Aurillac, de la Châtaigneraie cantalienne et du Sud de Mauriac. La partie basse des haies est constituée d’arbustes qui acceptent une taille annuelle (noisetier, hêtres, charme, prunellier, houx,...) et les arbres sont essentiellement des chênes pédonculés (voire des châtaigniers ou autres fruitiers en châtaigneraie cantalienne). Traditionnellement, la haie basse était taillée au croissant et fournissait des fagots pour le chauffage des fours. Les arbres étaient quant à eux émondés (les branches étaient coupées tous les 10-20 ans pour produire du bois de chauffage), ce qui confère un port spécial à ces arbres et un tronc tortueux. Aujourd’hui, l’épareuse a remplacé le croissant et les arbres ne sont plus émondés.

         



Trois exemples de haies basses ponctuées de grands arbres.

Cet entretien moderne entraîne toutefois sur le moyen terme (20 ans) un dépérissement de la haie basse car certains arbustes acceptent mal cette taille sévère (charme, noisetier, hêtre). Cela entraîne petit à petit leur disparition au profit de la ronce et du prunellier, deux essences invasives. La solution serait de limiter l’utilisation de l’épareuse et surtout de l’utiliser de la manière la plus douce possible : taille sans appuyer fortement sur la haie et légèrement en biais de façon à laisser les rayons du soleil venir au pied de la haie, et renouvellement régulier des haies en les coupant au sol et en les laissant repousser (renouveler le vieux bois). Un autre inquiétude au sujet de ces haies concerne les arbres, notamment les chênes : depuis les sécheresses de 2003 et 2005 et les pullulations de chenilles (tordeuse verte) en 2005 et 2006, on observe un dépérissement massif de ces arbres déjà âgés. Cela se traduit par des descentes de cimes (mortalité du sommet des arbres), voire par leur mort. Il serait nécessaire aujourd’hui de renouveler ces arbres en sélectionnant des jeunes tiges de chênes, frênes, érables, … dans les haies basses. Toutefois, l’entretien à l’épareuse ne permet pas ce travail de renouvellement des arbres car du haut du tracteur il est difficile de repérer les jeunes tiges à sélectionner.

         

Exemples de dépérissement des haies. Photo de gauche : haie avec trouées à la base. Photo de droite : chênes pédonculés morts (à droite) et avec descente de cime (à gauche); ces phénomènes sont liés aux sécheresses de 2003 et 2006.

Afin de lutter contre les menaces de dépérissement des réseaux de haies basses, des actions ont été menées par la Mission haie du CRPF : formation des agriculteurs sur l’entretien des haies (renouvellement des arbustes et des arbres, conseils d’utilisation de l’épareuse) et programme de replantation de haies en bordure de voirie (sur la communauté de communes de la Haute Châtaigneraie qui a mené un programme de ce type en 2002).

         

Replantation de haie basse ponctuée d’Erable sur la Communauté de Communes de la Haute Châtaigneraie. Commune de Teissière les Bouliès. A gauche : réalisation; à droite, objectif souhaité.

2 - LES RESEAUX DE GRANDES HAIES PLURISTRATIFIEES.

Les grandes haies pluristratifiées sont constituées d’un mélange intime d’arbres et arbustes en croissance libre. S’y mêlent les noisetiers, viornes, aubépines, prunelliers, sorbiers, érables champêtres ou planes, merisiers, alisiers blancs, pruniers sauvages, chênes, frênes, Peupliers noirs, Saules, etc…Ces haies avoisinent les 10 mètres de haut. Elles s’organisent en réseau et se trouvent en Artense, dans les vallées autour des Monts du Cantal (vallées du Falgoux, de Dienne, du Claux…) et sur quelques communes de la châtaigneraie cantalienne. Leur grande taille limite la visibilité à l’échelle de la parcelle, créant un paysage « intime ». Traditionnellement, ces haies étaient sources de bois de chauffage et faisaient office de brise-vent. Quelques billes de bois d’œuvre pouvaient aussi être récoltées car les arbres sont en croissance libre. Ajoutons que ces haies sont très riches en terme de biodiversité.

         



Exemples de trois grandes haies pluristratifiées du Cantal.

Traditionnellement ces haies étaient recépées, c'est-à-dire coupées à ras tous les 20-30 ans et les gros arbres récoltés à maturité. Aujourd’hui, ces haies sont toujours conservées comme brise-vent et comme source de bois de chauffage ou de piquet. Toutefois, un certain délaissement de ces haies entraîne un vieillissement qui limite le rôle brise-vent des haies : l’absence de clôture au pied des haie et le pâturage des animaux aboutit à des trouées à la base des haies, qui annule l’efficacité brise-vent. De plus, un certain vieillissement des haies aboutit à une « capitalisation » du bois sur pied : production de bois de gros diamètre au détriment des petites branches (efficaces en matière de brise-vent). Toutefois, le regain pour le bois de chauffage devrait inciter à exploiter à nouveau ces haies.

         


Trouée au pied d’une haie = perte d’efficacité brise-vent
Haie délaissée : les arbres grossissent, privent les arbustes de soleil et la haie se dégarnit de la base.

3 - LES BOSQUETS DE MARGERIDE ET DU PAYS DE RIOM-ES-MONTAGNES.

Les bosquets font partie des « arbres hors forêts » au même titre que les haies. Petits îlots forestiers implantés au milieu des prairies, ils contribuent au paysage avec leurs formes rondes (à l’inverse des formes linéaires des haies). Deux types de bosquets existent dans le Cantal : les bosquets de pins sylvestres en Margeride, Pays de St Flour et Planèze ; et les bosquets de Hêtres aux environs de Riom ès Montagne et sur l’Aubrac. Si ces derniers sont implantés sur des résurgences rocheuses, impropres à l’agriculture, les bosquets de pins sylvestres ont une histoire plus complexe. Selon l’Ecomusée de Ruynes en Margeride, ils entraient dans des rotations de cultures avec du blé (début 20è siècle). Les pins étaient semés (sur de la neige après un pâturage très ras avec des brebis à l’automne) ou plantés. A maturité (70 ans en moyenne), ils étaient exploités (en bois d’œuvre) et remplacés par du blé. Aujourd’hui, la plupart de ces bosquets sont pâturés car ils font partie intégrante des parcelles agricoles. On parle alors à juste titre de « pré bois ». Ils jouent également un rôle essentiel pour l’avifaune en servant notamment de refuges pour les Milans Royaux (en voie de disparition) et les Hiboux Moyen Duc.

         



Trois exemples montrant la vulnérabilité des bosquets isolés.

Ces bosquets sont très vulnérables et leur disparition est continue. Depuis la création des aides agricoles rattachées aux surfaces (PAC, 1992), les bosquets ont subi une forte pression de défrichement car les primes agricoles étaient défavorables aux arbres. La tempête de décembre 1999 a également mis à mal de nombreux bosquets de pins sylvestres (50% des bosquets de planèze ont été détruits à plus de 70 % ! Et seuls 4 d’entre eux ont été reconstitués malgré une aide incitative du Conseil Général du Cantal...). Leur maintien et reconstitution sont pourtant essentiels. Heureusement, l’évolution des conditions d’octroi des primes agricoles est en cours d’évolution, et les arbres mieux pris en compte. Espérons que les années qui arrivent verront le maintien et la reconstitution des bosquets.

4 - LES ALIGNEMENTS DE FRENES ENONDES.

Les alignements de frênes émondes sont une typicité du Massif central et encore plus spécifiquement de la Planèze, de l’Aubrac et du Cézallier où ils constituent la forme de bocage la plus répandue. Historiquement, ces Frênes étaient plantés ou semés (archives de 1789 relatant ces plantations). Leur émondage, qui consiste à un ébranchage sur des moignons de branches le long du tronc et au sommet de l’arbre tous les 3-10 ans, était destiné à « donner la feuille » au bétail (la feuille de frêne est un excellent fourrage). L’émondage avait lieu au mois d’août - septembre, lorsqu’il y a peu d’herbe dans les parcelles. Les vaches mangeaient alors les feuilles, et des fagots étaient récoltés. Les feuilles sèches étaient données en hiver aux vaches ou aux lapins. Cette pratique de l’émondage confère aux frênes une forme totalement différente de celle des arbres dont la croissance est libre. La forme typique de l’émonde est donc totalement anthropomorphique et paysagèrement fortement identitaire et patrimoniale. Les remembrements de Planèze ont fait régresser ces alignements et beaucoup ne sont plus émondés depuis plus de 20-30 ans. Ils perdent alors un peu leur forme si caractéristique. L’émondage est en effet fastidieux et potentiellement dangereux. Il n’a plus forcément sa place dans l’agriculture moderne actuelle. Toutefois, des agriculteurs continuent à émonder leurs frênes et certains jeunes agriculteurs de l’Aubrac savent tirer de nouveaux profits de ces émondes : ils ébranchent toujours les frênes l’été et laissent les bovins consommer les feuilles sur place, puis ils broient les branches et se chauffent avec les plaquettes (copeaux) obtenues.

         


Deux exemples d'alignement de frênes énondés.

5 - LES PAYSAGES SANS ARBRES DES ESTIVES (AUBRAC, CEZALLIER, PLOMB DU CANTAL).

Ces paysages sont depuis plusieurs siècles dénudés de tout arbre, hormis par les quelques reboisements en épicéas des années 70. Les estives sont pâturées par des troupeaux essentiellement allaitants. Sur les parcelles ouvertes aux 4 vents, les agriculteurs cherchent des solutions techniques pour protéger leurs troupeaux du mauvais temps. L’implantation d’une haie brise-vent est une solution. Toutefois, afin de ne pas « parasiter » le paysage avec de nombreuses petites haies, certaines règles paysagères sont mises en place. Par exemple, les longs linéaires sont proscrits car ils ne s’accordent pas aux formes rondes des reliefs environnants. Des linéaires courts et des bosquets sont préférés. L’implantation en crête est déconseillée. Enfin, les feuillus sont préférés aux résineux, car ceux-ci sont de mauvais brise-vent et ils s’intègrent mal au paysage (couleur sombre, allure plus pointue et trop rigide dans le paysage).


Plantation d’une petite haie brise-vent sur Allanche. Courte, de hauteur limitée et implantée en bas de pente, elle s’intègre bien au paysage et répond au besoin de protection climatique des troupeaux. L’arbre isolé en haut de versant est un Tilleul, implanté traditionnellement à côté des burons pour les protéger de la foudre. PARTIE 2 : rôles des haies dans le Cantal.

PARTIE 2 : ROLES DES HAIES DU CANTAL.

1 - LES HAIES ET LEUR RÔLE DE BRISE-VENT



Le rôle de brise-vent des haies est un des rôles essentiels des haies. Il faut savoir qu’une haie constituée d’arbres et arbustes feuillus bien denses (haie pleine sans trouée) protège une surface équivalente à 15 à 20 fois la hauteur de la haie. Les haies résineuses ne constituent en revanche pas de bons brise-vent. En secteurs balayés par les vents (Planèze, Cézallier, Aubrac), l’effet brise-vent des haies est recherché par les agriculteurs qui souhaitent protéger leurs troupeaux du vent d’Ouest ou Sud Ouest (vent de la pluie) et du vent du Nord (vent froid) : schéma 1. Outre la notion de bien être animal, il est démontré (par l’INRA) que le rendement en lait ou en viande est augmenté de l’ordre de 20 % entre des animaux exposés au vent et des animaux abrités du vent. De plus, les agriculteurs qui estivent expliquent que les haies limitent les risques de maladies pulmonaires sur jeunes veaux au printemps. Enfin, des animaux des souffrent du vent et du froid ne restent pas statiques : ils circulent dans l’espace et piétinent l’herbe. Avec une haie, les animaux restent abrités derrière et circulent moins, valorisant mieux le fourrage. Dans le Cantal, 155 km de haies brise-vent ont été replantés sur les secteurs ouverts de l’Est Cantal, dont 80 en Planèze, dans cet objectif.


Exemples d'abri fourni par une haies brise vent. Outre la protection des troupeaux, l’effet brise-vent a également un impact favorable sur le rendement des cultures : une haie protégeant une surface de 15 à 20 fois sa hauteur, le rendement sur cette surface est augmenté de 5 à 30 % par rapport à une situation sans haie.

Au pied de la haie, le rendement est diminué (concurrence des arbres pour l’eau et la lumière), mais sur le reste de la surface protégée (15 fois la hauteur de la haie) le rendement est augmenté car les végétaux transpirent moins pour lutter contre le dessèchement par le vent et donc utilisent mieux l’eau pour produire de la biomasse. De plus, l’évaporation du sol est diminuée. En secteurs irrigués ou limités en eau (Planèze, Région de Massiac où la pluviométrie ne dépasse pas les 750 mm d’eau/an), cet impact des haies est important et souvent sous-estimé. Les agriculteurs de planèze qui ont planté des haies il y a plus de 20 ans ont observé une augmentation de la récolte de fourrage derrière leurs haies. L’effet brise-vent limite également les problèmes de verse sur céréales et le déchirement des feuilles en cultures maraîchères. Enfin, une haie brise-vent capte la chaleur le jour et la restitue la nuit, permettant de gagner en précocité au printemps et de limiter les gelées.

Au niveau environnemental, cet effet brise-vent des haies a un impact important au niveau de la vitesse des vents sur un territoire donné. Plus le réseau de haie est dense et plus la rugosité régionale est augmentée, diminuant par exemple la vitesse des vents au dessus d’un hameau de 70 à 40 km/ h. Egalement, les secteurs bocagers sont plus pluvieux que les secteurs non arrosés.



2 - LES HAIES ET LEUR RÔLE DANS LA REGULATION DE L’EAU

Les haies implantées perpendiculairement au sens de la pente jouent un rôle de rétention de l’eau à l’échelle de bassin versant. La problématique de la gestion de la ressource en eau est d’actualité, et les haies peuvent être des alliées intéressantes. Un haie sur talus fonctionne comme une éponge : elle garde l’eau et la libère peu à peu. Cette capacité de stockage se situe essentiellement sur 40 cm de profondeur sur 40 m en amont du talus et sur 1 m de profondeur au sein du talus. Des études montrent, qu’en fonction du type de sol, 5m³ d’eau sont stockés par mètre de talus. La période la plus visible pour observer ce stockage est l’été car c’est au pied des haies sur talus que l’herbe repousse le mieux. De plus, de nombreuses sources prennent naissance dans les talus. Par exemple, suite à un remembrement en 2004 dans les Combrailles (Puy de Dôme), un agriculteur a récupéré une parcelle de 10 ha sur laquelle il a fait raser toutes les haies. Dans la demie journée qui a suivi cet arasement, la source qui alimentait un hameau (420 l/s) s’est tarie. Après une semaine de forage, la source a été retrouvée, mais 80 m plus bas et diminuée des deux tiers. L’effet talus - haie constitue également une coupure de pente qui facilite l’infiltration de l’eau de pluie qui ruisselle en surface. En aval, cela limite l’intensité des crues. En zone de culture, ces haies piègent les particules érodées. Il faut savoir qu’en fonction du type de sol, de la pente et des techniques culturales, l’érosion des sols peut monter jusqu’à 80 tonnes de terre par hectare et par an ! Les haies peuvent donc limiter les problèmes de coulées de boue, de comblement des fossés et préservent ainsi le capital agronomique des sols. Ces problèmes sont par exemple très fréquents dans les plaines céréalières de Limagne. Le Cantal est moins concerné.



3 - LES HAIES ET LEUR RÔLE DANS LA LUTTE CONTRE LES POLLUTIONS

Les haies perpendiculaires au sens de la pente et les ripisylves (haies de bords de cours d’eau, composées d’essences inféodées à l’eau) jouent un rôle de piégeage des nitrates et pesticides. En effet, les racines des arbres et l’herbe du pied de haie vont capter la majorité des nitrates et produits phytosanitaires qui percolent jusqu’à elles, limitant ainsi les pollutions en aval. Schéma source SOLAGRO


Les ripisylves jouent d’autres rôles favorables au cours d’eau : l’ombre apportée limite les variations de températures journalières de l’eau, ce qui est favorable aux salmonidés. Les racines sont de puissants rétenteurs de berges : une haie de saule de 20 ans retient 4 fois mieux une berge qu’un enrochement.

4 - LES HAIES COMME SOURCE DE BIODIVERSITE

Les haies sont des sources de biodiversité animales et végétales très importantes. Interfaces entre la forêt et l’agriculture, elles accueillent une flore et une faune spécifique de la forêt, de l’agriculture et de la haie elle-même. La haie fournit nourriture, abri et site de reproduction à de nombreuses espèces vivantes : il s’agit d’un habitat. En Planèze de St Flour, depuis 1983, le Groupement d’Intérêt Cynégétique de la Perdrix grise finance l’implantation de haies pour créer un habitat hivernal aux perdrix grises. Un autre exemple intéressant concerne les abeilles, en voie de disparition partout en France. Les haies sont des refuges pour les abeilles car elles offrent des sources de pollen et de nectar : pollen précoce en sortie d’hiver (noisetier, chatons de saule) et tout au long de l’année (tilleul, bourdaine, Lierre,...).


A cette notion d’habitat s’ajoute la notion de corridor : de nombreux animaux se déplacent dans l’espace en suivant les haies. Par exemple, la plupart des chauves souris utilisent abondamment les haies : celles-ci leur servent de guide de circulation dans l’espace, de territoire de chasse directe (nombreux insectes sous les branches des haies) et de réservoir d’arbres creux (gîtes l’été). Pour certaines espèces, une coupure de plus de 100 m entre deux haies bloque leur circulation dans l’espace et réduit ainsi leur territoire. Autre exemple (source ONCFS) : suite à un remembrement, une population de lapin de garenne s’est retrouvée isolée de toute haie à 1 km à la ronde ; aucun échange n’était alors possible avec d’autres populations de lapins de garenne. La population s’est affaiblie et a fini par disparaître pour cause de consanguinité.

5 - RÔLE DES HAIES DANS LA LUTTE CONTRE LES RAVAGEURS DES CULTURES

Ce rôle des haies est une déclination du rôle précédent, mais adapté au monde agricole. La richesse faunistique de la haie la transforme en alliée de l’agriculteur lorsqu’elle accueille des prédateurs des ravageurs des cultures. Dans le Cantal, un des ravageurs les plus problématiques est le rat taupier (campagnol terrestre). Son prédateur principal est l’hermine. Or, celle-ci ne s’éloigne jamais à plus de 300 m d’un abri (haie, muret). La présence de haie facilite donc la pénétration des hermines dans les prairies et facilite leur rôle de prédateur. Les haies abritent aussi des vipères, renards et offrent des sites de reproduction ou de perchoirs pour les rapaces, qui sont autant de prédateurs des rats taupiers. A titre d’exemple, une vipère dévore annuellement 50 à 100 rongeurs par 100 mètres de haie et un couple de hiboux moyen ducs avec leurs jeunes consomment 3300 campagnols par an. En zone de bocage, les pullulations sont donc beaucoup plus rares. Autres exemples intéressants : les lézards verts sont nombreux dans les haies : ils contrôlent des pullulations d’insectes au sol sur une bande de 20 m de part et d’autre des haies.


Lézard vert, un élément de la biodiversité des haies, au rôle important contre la lutte contre les ravageurs des cultures.

Les coccinelles limitent les pullulations de pucerons si elles sont présentes dans la culture avant l’arrivée des pucerons. Pour cela, il faut qu’elles aient hiberné sur place, notamment sous les écorces des arbres de haies ou dans l’herbe sèche au pied de celles-ci.

6 - LES HAIES COMME SOURCES DE REVENU ECONOMIQUE

Les haies peuvent apporter une source de revenu non négligeable, que ce soit sous forme de fruits ou de bois. La principale valorisation du bois est le bois de chauffage (sous forme de bûche ou de plaquettes). Avec les chaudières à plaquettes, il est montré qu’une moyenne de 4,5 km de haie adulte entretenue tous les 15 ans (= 300 mètres par an) permet de chauffer une habitation. Du bois d’œuvre peut se trouver dans les haies, en faible quantité. Citons le Noyer, qui ne pousse pas en forêt, le Merisier, le Peuplier, etc... La Production de piquet est traditionnelle chez les agriculteurs du Cantal : les haies de chênes et de châtaigniers sont souvent exploitées à cette fin.

Ainsi, outre les précédents rôles des haies (brise-vent, rétention d’eau), les haies peuvent être également source de revenu, d’où l’intérêt de les conserver.


         

Deux illustrations du revenu tiré de l'exploitation des haies.


Résumé



Cinq rôles majeurs peuvent être reconnus aux haies :

- Elles constituent une protection contre l’érosion (haie perpendiculaire au sens de la pente, présence de talus, importance de la pente).

- Elles agissent comme brise-vent en fonction de leur orientation, du nombre de strates qui les composent, de leur continuité.

- Les haies de bords de cours d'eau, ou ripisylves, constituent un habitat disponible pour les prédateurs des ravageurs de cultures ; en conséquence, elles augmentent la biodiversité.

- Sur la faune sauvage les haies ont une influence marquée par la continuité du réseau bocager car les haies longues et continues facilitent la circulation de la faune sauvage. De même par leur composition végétale : nombre de strates, présence d'arbustes à baies et d'arbres à cavité, existence de talus de pied de haie, les haies augmentent la diversité des milieux.

- Elles ont un rôle paysager, dans le cas d’une spécificité locale, lorsque leur linéaire se trouve en bordure de chemin de randonnée, et lorsque le bocage est à proximité du bâti...




En conclusion, les haies sont garantes de l'équilibre d'un territoire.







Eléments d'une plaquette éditée par la "mision haie" au CRPFA :
Centre Régional de la Propriété Forestière d'Auvergne.