geo.cybercantal.net sommaire les moulins 2 : Bibliographie
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I. Un ouvrage de portée européenne : la pierre à pain (A. Belmond)

II. Une thèse sur les Moulins d’Auvergne (L. Perry)

III. Les moulins de Lieutadès, Cantal (A et L. Le Bail)

IV. Les moulins de Marcolès, Cantal (Y. Souquières, C. Souquières et M. Croute)

V. Conclusion provisoire (M. Bhaud)



I. Un ouvrage de portée européenne : la pierre à pain (A. Belmond)


« La pierre à Pain : les carrières de meules de moulins en France, du Moyen Age à la révolution industrielle ». Thèse de doctorat Université de Grenoble, publiée par les Presses Universitaires de Grenoble. Cet ouvrage comporte trois parties : A : Les meules en leurs moulins ; B : Le temps des provenances dispersées ; C : La Ferté-sous-Jouarre, capitale mondiale de l’industrie meulière. Cet ouvrage, même s’il ne fait pas appel aux données du Cantal, permet de prendre connaissance à l’échelle de la France, de l’importance de ces pierres à pain depuis le Moyen Age jusqu’à l’époque industrielle. Nous pensons que cet ouvrage, par sa portée nationale, devrait être connu dans toutes les provinces françaises. De plus il aide à comprendre l’importance de la mouture. Citons les premières lignes de l’ouvrage. « Comme ses cousins germains les grains de seigle, d'épeautre, d'orge ou d'avoine, [le grain de blé] se laisse difficilement éplucher. Sa petite taille ne permet pas de l'ouvrir d'un coup de doigt, comme on le ferait d'une pêche ou d'un abricot - à moins de vouloir sacrifier des heures d'un travail minutieux, pour n'obtenir qu'un bol de farine ! Son enveloppe externe quant à elle, cette écorce que l'on nomme le son, s'avère aussi dure qu'indigeste et empêche que l'on puisse simplement le croquer avant de l'avaler, à la manière d'une fraise ou d'un grain de raisin. Pour parvenir sur la table du repas, toute céréale doit donc au préalable avoir été écrasée puis tamisée ».





II - Une thèse sur les Moulins d’Auvergne

Nous sommes heureux de présenter ce travail préparé par Mme Perry, intitulé « Le Moulin et le meunier dans la société rurale auvergnate du XVIII° siècle ». Madame Laurence Perry a soutenu sa thèse à l’Université de Clermont, sous la direction de Mr Poitrineau, en 1986. Cette thèse n’a jamais été publiée et c’est avec plaisir que nous en présentons un large extrait.

L’intérêt de ce travail repose sur deux éléments. D’une part le sujet concerne le meunier et ses relations sociales. C’est un thème neuf si on se réfère aux nombreuses plaquettes qui traitent le plus souvent de la technique employée (nature de l’énergie, matière traitée, nombre de tournants…D’autre part, il se rapporte à l’Auvergne, certes avec une majorité de documents relatifs à la basse Auvergne (Puy de Dôme) mais la Haute Auvergne (Cantal) n’est pas pour autant négligée.

A nos yeux, l’intérêt repose sur le thème central : « Etudier la machine sans étudier le meunier se­rait absurde mais expliquer la situation économique et sociale du meunier sans poser le problème techni­que est un non-sens ; dans cette étude, la technique, l’économie et la société s'imbriquent. » L’intérêt est de montrer l’hétérogénéité du modèle « Moulin » : moulin privé, moulin commun, moulin propriété du meunier, moulin loué, moulin sans meunier…grand moulin avec habitation ou petit moulin enjambant le ruisseau sans déviation latérale…

Une province comme l'Auvergne détruit quelque peu l'image traditionnelle du meunier et du moulin : beaucoup de moulins communs, propriété d'une famille d'un village, peu productifs et surtout sans meunier, le personnage du meunier n'existe pas et le moulin n'a pas sa place conventionnelle dans la société rurale. C'est autour des moulins banaux que la rela­tion meunier-communauté villageoise se développe le plus et c'est là qu'elle apparaît dans toute son ambiguïté : contraints de se rendre au moulin qui devient dès lors lieu de rassemblement - au contraire de ce qui se passe là où le meunier assure les transports - les villageois détestent et jalousent ce personnage qui use et abuse de son pouvoir avec la bénédiction de la justice seigneuriale. Retenons donc que l’image du moulin et du meunier n’est pas unique.

Mais au-delà de cette hétérogénéité, plusieurs caractères communs émergent, propres à l’Auvergne. Trois traits caractérisent les moulins auvergnats : la prépondérance des moulins à eau, une majorité de roues horizontales et la petite taille des "usines". Le moulin auvergnat est avant tout une construction banale, le plus souvent blottie au creux d'une gorge. Le moulin auvergnat s'est adapté à la situation et parvient à se contenter de fort peu d’eau par l’emploi de la roue horizontale; aussi, la carte de répartition des moulins corres­pond assez bien à l’importance [au découpage] du réseau hydrographique : les ruisseaux sont très nombreux dans le Cantal, mais réduits dans le Puy-de-Dôme.

Ce travail comporte trois parties :

I : Le moulin dans son carcan juridique : Méfiance et concurrence
II : Le règne du moulin hydraulique rustique
III : Le meunier en son moulin : un personnage complexe et controversé mais une exploitation souvent difficile à équilibrer. Les deux premières parties seront seulement présentées.

M.B.

Auteur : Perry, Laurence 1986. Le Moulin et le meunier dans la société rurale auvergnate du XVIII° siècle. Thèse de 3em Cycle sous la direction de A. Poitrineau. Université de Clermont-Ferrand, 409 pages.

Contact : Madame Perry directrice des Archives Municipales et Communautaires de la Ville de Strasbourg, 32 Route du Rhin 67076 Strasbourg Cedex

Le Moulin et le meunier dans la société rurale auvergnate du XVIII° siècle. Par Laurence Perry

Introduction générale

"L'étude du moulin n'est pas seulement intéressante en elle-même. Son évolution technique est en liaison étroite avec l'évolution du milieu social et le rythme de la vie économique." [MM. Furia et Serre, "Techniques et sociétés, liaisons et évolution" p 80].

Le moulin est la première machine, une invention qui connut une longévité exceptionnelle. Si les premiers moulins remontent à l'Antiquité gréco-romaine, les derniers fonctionnèrent nombreux avant la seconde guerre mondiale. Cette pérennité a été rendue possible par l'évolution technique. Le moulin antique faisait appel à la traction humaine ou animale, le progrès décisif va être l'utilisation de la force motrice hydraulique.

Marc Bloch signale un moulin à eau dès l'an 10 avant notre ère dans le palais de Mithridate. Vraisemblablement la roue horizontale a précédé la roue verticale mais les deux systèmes coexisteront jusqu'à nos jours. Au XII° siècle, le moulin à vent né en Orient se répand en Occident. Pendant longtemps, les techniques de construc­tion des moulins et le travail des meuniers ne varieront pas ; il faut attendre le XVIII° siècle, l'intérêt pour les sciences et les techniques, pour que les choses évoluent. a partir de là, les innova­tions se multiplient, elles concernent essentiellement les moulins à eau, les moulins à vent étant peu susceptibles d’améliorations.

La place économique de ces moulins est essentielle pour la nourriture (moulins à farine, à huile), pour l'industrie du cuir (moulins à tan), des textiles (foulons à draps, à chanvre), la papeterie (moulins à papier), la métallurgie (forges, travail du cuivre).

Le moulin est une véritable petite usine surtout lorsqu’il rassemble plusieurs de ses fonctions. Cette pièce essentielle de l'économie ne pouvait laisser indifférent : très tôt, les seigneurs laïcs ou ecclésiastiques étendront leur emprise sur les moulins, instaurant la banalité. Propriétaires des eaux non navigables de la terre, l’autorisation de construire des moulins relève de leur autorité. Plus tard, la bourgeoisie s’emparera de la plupart des moulins urbains.

Le moulin, pièce maîtresse de l'économie devient, à coté du château et de l'église et avant le cabaret, le troisième centre de vie sociale. Indispensable à la population, il voit se développer autour de lui et de son occupant l'envie, la contestation, voire la haine. Le meunier ne laissa jamais indifférent, il n'existe pas une profession aussi décriée : fripon, voleur, coquin, le meunier, ni tout à fait paysan, pas vraiment artisan, suscite néanmoins l’admiration pour sa ruse, sa débrouillardise et sa richesse, réelle ou supposée.

D'après Ordinaire [Essai sur le département du Puy-de-Dôme], le seul département du Puy-de-Dôme compte, sous le Premier Empire, un millier de meuniers. L'enquête de 1809 donne un nombre de roues [Le nombre de roues est supérieur au nombre de moulins] égal à 4139 pour le Cantal, le Puy-de-Dôme et l'arrondissement de Brioude qui composent le cadre de la généralité d'Auvergne [A.N. F 20 295 et F 20 296].

Parmi les moulins, nous avons effectué un tri et écarté les moulins à tan, foulons à drap, papetiers et forges, plus "industriels", plus rares, pour ne garder que les moulins à farine, huile et chanvre.

Les moulins fariniers assurent une fonction essentielle dans un régime alimentaire fondé sur le pain. Le moulin est un point de passage obligé, un reflet de la consommation : en Auvergne, les roues à Ségala, à seigle, l'emportent largement sur les roues à pain blanc.

La faiblesse de l'élevage, surtout laitier, fait de l'huile la principale matière grasse : huile de noix, de chènevis, de faines de hêtres, enfin, le chanvre est souvent travaillé avec la meule à huile. Le moulin sert à adoucir le chanvre qui est .passé "sous une grosse meule de pierre en forme de cylindre tournant dans un bassin de pierre égal au moulin dont on se sert pour écraser les noix, le chènevis et autres denrées propres à faire de l'huile. C'est la maille ou maillerie". Le chanvre est vendu sous forme de fil ou toile de chanvre sur les marchés locaux, exporté vers le midi [A.D. P.D.D. C 812] et surtout, vendu à la marine royale par un système de traité entre le département de la marine et un ou plusieurs gros marchands[A.D. P.D.D.C 804 à 807]. On a projeté même de fournir du chanvre à la Compagnie des Indes mais la qualité inférieure du chanvre et son coût plus élevé en raison des frais de transport feront échouer le projet [A.D. P.D.D. C 810].

Au XVIII° siècle et au début du XIX° siècle, le nombre des moulins tend à croître : la Sioule, d'Ebreuil à St Pourçain, fait aller 16 moulins ; au début du XIX° siècle la principale rivière de Malintrat entraîne 115 tournants, [A.D. P.D.D. 501 Malintrat]. Le nombre des moulins au XVII° siècle aurait sextuplé par rapport au IX° siècle mais au XVIII° siècle, le mouvement de construction ne s'est pas arrêté puisqu'à Brousse Montboissier, pas moins de 7 moulins sont édifiés entre 1740 et 1770, [J. Boithias et C. Mondin : "les moulins à papier et les anciens papetiers d'Auvergne" page 290] et dès que la Révolution lèvera les obstacles institutionnels - la banalité - le nombre de moulins sera multiplié par 2, 3 ou 4 dans certaines communes. Chaque commune du district d'Ambert compte en moyenne 10 moulins et si les communes du district de Riom ou Thiers n'ont que 5 moulins chacune, il faut tenir compte du nombre de roues par moulin, sensiblement plus élevé.

Etudier la machine sans étudier le meunier serait absurde mais expliquer la situation économique et sociale du meunier sans poser le problème technique est un non-sens ; dans cette étude, technique, économie et société s'imbriquent.

1ère partie ;

LE MOULIN DANS SON CARCAN JURIDIQUE

MEFIANCE ET CONCURRENCE.

Dès l'origine, l'établissement et la gestion des moulins n'ont pas été laissés au libre arbitre des particuliers : l'activité des moulins, essentielle pour la subsistance, aurait entraîné la multiplica­tion anarchique des "usines". Les seigneurs, laïcs ou ecclésiastiques, s'arrogent dès le Moyen-Age un droit de regard en tant que propriétaires de moulins banaux et des rivières non navigables. L'Etat, la communauté urbaine veulent, quant à eux, empêcher les exactions des meuniers et, dans le cas de moulins hydrauliques, éviter que les nouveaux établissements soient préjudiciables au public.

Dès lors, le moulin et son occupant allaient être encadrés par une réglementation compliquée. Le fait que l'Auvergne soit presque entièrement une "province à moulins hydrauliques" accroît les règles restrictives : l'eau est un moteur plus "matériel" que le vent, se prêtant à l'appropriation et dont l'utilisation anarchique peut entraîner de fâcheuses conséquences pour les autres moulins, la navigation, les cultures.

I Les règles communes à tous les moulins (actionnés par le vent ou par l'eau)

Les moulins sont soumis à deux types de police : une police générale édictée par l'Etat, les coutumes provinciales, les municipalités qui vise surtout à protéger la clientèle du meunier et en général tous ceux pour qui le moulin est un point de passage obligé ; l'autre par un droit seigneurial qui tend plutôt à asseoir le monopole seigneurial en parti­culier la banalité. La coutume d'Auvergne reste d'une discrétion étonnante au sujet des moulins, surtout dans une province bien pourvue en usines ; en parti­culier, elle évacue la banalité en une ligne, or le banalité, sans être excessivement répandue, est une réalité en Auvergne.

A La banalité des moulins

Les moulins étant une installation coûteuse -comme les pressoirs -, leur construction fut, à l'origine, le fait des seigneurs laïcs ou ecclésias­tiques. Si tous les moulins seigneuriaux ne sont pas devenus banaux, des seigneurs usèrent du droit de ban pour contraindre leurs sujets à moudre exclusi­vement à leur moulin, empêchant quiconque d'établir un autre moulin dans le ressort de la Châtellenie. Les droits impliquent, dans la société d'Ancien Régime, des devoirs : le seigneur banal est tenu de veiller à l'entretien du moulin, à l'efficacité des services, et doit faire respecter la priorité des assujettis à la banalité sur les "étrangers". Le déséquilibre entre droits et devoirs entraîne infailliblement des conflits entre les communautés intéressées et le seigneur (ou son meunier).

1) les droits du seigneur banal

a - Le cadre géographique

La banalité s'exerce sur les habitants d'un territoire bien délimité. Toute tentative d'extension de la part des seigneurs se heurte à des résistances en vertu de la coutume. Quelquefois, les baux à ferme des moulins banaux définissant le territoire où s'applique la banalité. Les trois moulins de Pontgibaud, Platepierre et St uurs, propriété du comte de Pontgibaud, sont banaux pour les habitants de Pontgibaud, Madrat , Aiguillon. Bromont, Provenchère, Mioche, Bouzarat, Vixeron, Lauchine, La Housse et Banières, Chausselles, Boslaugs, Lacourteix, les Roches, Beauregard. [A.D.P.D.D. 5 E 22 dép 496]. A Cropières, en Haute Auvergne, le moulin du Goul est banal pour les tenanciers du Mont, la Maisonnade, Rentières, la Garde, Goul, Puech, Baldrias, La Vergne, La Cairie et Raulhac. [Mémoire de maîtrise "la seigneurie de Cropières" par Milaveau, Pierre ; p 73].

Au XVIII°, il arrive que les seigneurs banaux cherchent à étendre leur emprise, réaction seigneuriale, sans doute. En 1672, à Aubusson, le seigneur attaque en justice trois personnes pour les contraindre à se servir du moulin banal ; les défenseurs avancent que le tènement était inoccupé avant eux et donc non soumis à la banalité : le jugement leur donnera tort. [A.D. P.D.D. 2 E 328 pièce 31]. En 1766, les habitants de Brioude sont en procès avec leurs chanoines - comtes qui cherchent à faire reconnaître comme banaux les moulins de Latour et du Daudelois. La première sentence ayant été cassée par le présidial de Riom, ils cherchent à instaurer une situation de fait en empêchant les autres meuniers de venir en ville ce qui, à terme, contraindrait les habitants à venir aux moulins de Latour et du Daudelois ; avec le temps, la coutume les rendrait banaux ... [BV. Clermont Fd. MS 1170].

Inversement, certains peuvent profiter des subtilités de la jurisprudence pour se soustraire à la banalité : ainsi en 1783, les religieuses du monastère de Saint-Joseph, à Murat, se déclarent hors des limites à l'intérieur desquelles s'applique la banalité. [A.D. P.D.D. Fds Ribier-Sartiges liasse 18]. A l'intérieur des limites ainsi circonscrites, les habitants sont soumis à la banalité c'est-à-dire à un certain nombre de contraintes soigneusement codifiées cependant.

b - Les devoirs des tenanciers

Les habitants soumis à la banalité sont tenus de faire moudre leur blé - ou plutôt leurs graines -exclusivement au moulin banal. Les coutumes se montrent plus ou moins dures : celle du Poitou, par exemple, semble exigeante, car elle stipule que lorsque le seigneur du fief n'a pas de moulin dans sa banlieue, les sujets roturiers doivent aller moudre au moulin du seigneur suzerain. [Delamare, Traité de police, Tome II p 153]. En revanche les coutumes de Paris, Orléans, Nivernais exigent du seigneur un titre valable c’est-à-dire que c'est à lui à faire preuve de son droit. [Delamare, Tome II, p 153]. Certaines coutumes - Poitou, Angoumois - ne reconnaissent pas comme banaux les moulins tenus à ferme ou à rente par le seigneur, il doit être pro­priétaire. Comme on ne pouvait faire parcourir de trop grandes distances aux justiciables, des coutumes limitent leurs déplacements : celle de Saintonge limite à une lieue la distance entre le moulin banal et le domicile du justiciable. C'est une dispo­sition qui semble avoir été communément admise. La distance se compte en lieues ou...en tours de roues de moulin. [Guidin, Claude : Aperçu sur les conditions de la mouture des grains en France, fin XVIII°s, in Contribution à l'histoire paysanne de la révolution française, A Soboul p178]. Vraisemblablement, on calculait la distance grâce au nombre de tours de roues du moulin jusqu'au domicile des justiciables. Lorsque le justiciable enfreint la banalité, il encourt une amende qui peut être le paiement du moulage au meunier banal, une amende en argent et la confiscation du sac et de la fausse. En Nivernais, l'amende s'élève à 60 sols (un écu de 3 livres) et le sac et la farine sont confisqués. [Delamare, Tome II, p 154.155]. En Auvergne, la banalité n'est pas de droit et doit être prouvée par titre. A Sugères, la banalité est assise par une transaction de 1403, tous les habitants de la baronnie de Montboissier et de Sugères y sont sujets. Les moulins préexistants à la banalité sont maintenus mais les contraventions semblent fréquentes car les assises tenues au bourg en 1727, 1758, 1778 rappellent aux habitants qu'ils doivent se conformer à la banalité. [ A.D. P.D.D. C 2035]. Outre l'obligation d'aller moudre, les transac­tions ont pu aboutir à la création de devoirs parti­culiers : la communauté des habitants de Blanzat paie le charroi des meules du moulin banal soit 40 livres tous les 5 ans environ. [b greffe cour BE liasse 89 A.D. P.D.D]. Que se passe-t-il en cas de contraventions ? L'existence de multiples transactions crée des cas de figures nombreux, mais, à Besse, en 1766, un boulanger est condamné à payer 9 sols d'amende ; un autre boulanger se voit infliger la même peine.

Devoirs et contraintes ne sont pas unilatéraux : pour maintenir la banalité, les seigneurs sont astreints à diverses obligations vis à vis de leurs sujets. Elles visent toutes à assurer le mieux possible le service de cette clientèle qui, théoriquement, ne peut jouer sur la concurrence entre meuniers.

2) Les devoirs du Seigneur banal

Le seigneur ou, plus exactement, son meunier, est contraint d'entretenir en bon état le moulin banal, d'effectuer la mouture en un temps limité et de faire moudre le blé des justiciables. Les mesures tendent à empêcher les excès qui ne manqueraient pas de se multiplier dans une situation de monopole si bien garantie par la justice seigneuriale.

a - L'entretien

Le moulin doit être entretenu en bon état sinon les sujets peuvent aller moudre où bon leur semble jusqu'à ce qu'il soit séparé. Une fois les réparations effectuées, les justiciables sont tenus de retourner moudre au moulin banal. Chaque fois que le moulin est inactif faute de réparations ou même en raison des glaces, de la sécheresse, du manque de vent, les sujets sont dispensés de s'y rendre et vont moudre ailleurs. [Delamare, Tome II p 153].

Cette question de l'entretien est essentielle : nous aurons l'occasion de constater la cherté et la fréquence des réparations. Les seigneurs se font tirer l'oreille pour les effectuer, d'autant qu'ils n'ont pas de concurrence ; or un moulin nécessitant des réparations délivre une mauvaise mouture et entraîne de grosses pertes de farine. De son côté, par négligence ou mauvaise volonté, le meunier banal peut être tenté de faire traîner la mouture. Les coutumes et transactions ont donc fixé un temps maximum pour moudre le grain.

b - Les limites de temps

Le meunier banal, confronté à une clientèle nombreuse qui n'a d'autre recours que lui, aurait, pu être tenté ou même forcé de garder les blés trop longtemps, imposant des délais interminables aux utilisateurs, c'est pourquoi les coutumes donnent un temps maximum pour moudre. Les coutumes de Marche, Angoulême, Nivernais donnent 24 heures au meunier pour moudre ; celles de Touraine, Loudun, Bourbon, Anjou, Maine, lui accordent 36 heures. En Bretagne, les meuniers occupant des moulins hydrauliques disposent de 3 jours et 3 nuits soit 72 heures. En revanche, s'ils travaillent dans des moulins à vent, ils n'ont droit qu'à 24 heures. En cas de retard, les justiciables peuvent aller faire moudre ailleurs [Delamare, Tome II, p 157.158]. La limite de temps n'est pas évoquée en Auvergne, par contre les meuniers "concurrentiels" gardent fréquemment les blés au-delà de 24 ou 36 heures. Pour les meuniers banaux, nous avons une indication concernant le meunier des Martres de Veyre ; il dispose de 24 heures pour moudre. [A.D. P.D.D. C 2373]. La même volonté d'accélérer la mouture a inspiré l'obligation de la priorité de passage et l'ordre de passage pour le service de la clientèle.

c - Priorité et ordre de passage

Le meunier banal ne doit pas préférer un client à un autre. Delamare, citant Antoine Loisel, exprime cette règle qu' « en moulins banaux qui premier vient, premier engraine : mais après avoir attendu vingt quatre heures, qui ne peut à l'un s'en aille à l'autre [Delamare Tome II p. 158]

En Bretagne, la coutume condamne à l'amende le meunier qui a contrevenu à l'ordre de passage ; seul le seigneur a préséance. (1) [Delamare Tome II p. 158]. Les meuniers, en outre, n'ont pas le droit de moudre le grain d'étrangers, C'est-à-dire étrangers à la banalité - si la mouture des sujets au ban doit attendre.

Les obligations des meuniers et des seigneurs ne sont pas lettre-morte : les habitants n'hésitent pas à intenter des procès si elles ne sont pas remplies. En 1718, Nicolas Aubert, dit Gresses, meunier au moulin banal de Besse, est accusé d'avoir moulu le grain d'une habitante du Verdier, paroisse de St Vitard, étrangère à la banalité ; or il "ne devait faire moudre les farines au préjudice de ceux qui sont soumis à la banalité." Le meunier se défend en alléguant que le blé était au moulin depuis deux jours mais "il ne pouvait faire moudre le blé des forains quand il y en a dans le moulin de ceux qui sont soumis à la susdite banalité ?". La farine est saisie et le meunier condamné au total à 13 livres d'amende [A.D.P.D.D. B greffe Cour BE 26]. La même accusation est proférée en 1743 contre le meunier des Martres de Veyre : comme il retire des étrangers un droit de mouture plus élevé, il préfère souvent les étrangers aux habitants dont le grain reste huit jours au moulin sans être moulu. Le moulin nécessitant de grosses réparations pour bien fonctionner, le meunier fraude et truque les mesures. Aussi, le dimanche 5 mai 1743, l'assem­blée du corps commun demande au commandeur de Tortebesse et au marquis de Tane, copropriétaires du moulin, de faire rétablir le moulin conformément aux ordonnances dans trois jours, faute de quoi il sera permis aux habitants d'aller moudre où ils veulent impunément. Mais, après des sentences en 1743, 1744, 1745, 1747, 1749, en 1786, les habitants des Martres en sont toujours à réclamer : 50 ans pour faire exécuter une sentence ! Les justiciables n'ont guère de poids face à un meunier qui profite de son monopole. Cette situation a permis qu'au cours des siècles, la banalité perde sa qualité de service public et devienne une entrave à l'économie et au progrès.

3) La banalité anti-économique

La banalité a pu, à l'origine, assurer un véritable service public : aux XIV°- XV° siècles, n'importe quel particulier n'était pas en mesure de construire et entretenir un moulin, mais la banalité s'est figée, ne s'adaptant ni à l'évolution technique, ni à l'augmentation de la population, inadaptation largement voulue par les seigneurs qui ont tout intérêt à comprimer au maximum les frais d'entretien des moulins pour les rentabiliser.

a - Inadéquation du nombre des moulins à l'évolution de la population

1. Depuis l'établissement des moulins banaux, aux XIV°.XV° siècles, la population s'est accrue» Le XVIII° siècle est une période d'expansion démogra­phique ; or le nombre des moulins ne croît pas. A la Révolution, les conditions de mouture sont devenues déplorables en certains lieux et les cahiers de doléances s'en font l'écho. Le cahier de doléances de Maron (canton de Nancy Nord) réclame la suppres­sion de la banalité car le moulin dont dépend la population est incapable de moudre tous les grains des habitants : "du temps de nos ancêtres, les eaux du moulin étaient le double plus abondantes qu'elles sont actuellement ; dans ce temps, le village de Maron n'était composé que d'environ 30 habitants au lieu qu'aujourd'hui il en existe près de 200 ce qui fait environ mille âmes vivantes... Comment un moulin aussi mal en état, qui n'a qu'un tournant et qui manque d'eau les trois quarts de l'année, pour­rait subvenir à moudre autant de blé et le rendre bien moulu ?"[Revue La Pensée n° 119 fev 65 Ch. Parain "Rapports de pro­duction et développement" p 67].

Dans certains lieux comme St Amant Tallende, Murat, il existe plusieurs moulins banaux mais il ne semble pas qu'ils aient été construits au fur et à mesure de l'accroissement des besoins : les trois moulins de Murat datent du XIV° siècle [A.D. P.D.D., RIBIER SARTIGES liasse 18]. Lorsque la pression démographique s'accentue, la consommation de grains s'accroît en proportion, il faut davantage de moulins pour moudre, sinon les délais d'attente s'allongent et le rôle de service public du moulin ne sera plus rempli. Il ne semble pas que les seigneurs aient accompli un effort de construction. Déjà, ils s'abstiennent autant qu'ils le peuvent d'effectuer les réparations indispensables.

b - Le mauvais entretien des moulins banaux

Un meunier "libre" effectue de fréquentes répa­rations pour maintenir en état son outil de travail et afin d'éviter la fuite de la clientèle vers des moulins mieux entretenus ; un meunier banal qui n'est pas propriétaire de son moulin et qui jouit d'une clientèle "garantie" ne s'embarrasse pas de frais d'entretien. Il n'est tenu à effectuer que les menues réparations dont la négligence entraîne la lente dégradation du moulin. Le seigneur prend à sa charge les grosses réparations : celles à la digue du moulin par exemple et généralement celles exigeantes en bois ou en fer, mais il attend longtemps avant de les ordonner car le rapport entre le revenu du moulin et les frais engagés pour son entretien, augmente.

Le cahier du bailliage de Nemours décrit parfaitement la situation ; "le privilège exclusif dont jouit la propriétaire du moulin banal, fait qu'il n'a aucun intérêt à perfectionner son moulin et à le mettre en état de faire de bonne farine et de tirer du grain toute celle qui s'y trouve renfer­mée. Entre un bon moulin conduit par un habile meunier et un mauvais moulin dirigé par un meunier ordinaire qui n'a d'intérêt ni à contenter le public, ni même à faire un bon travail pour le seigneur, qui paye son temps de quelque manière qu'il soit employé, la différence du produit est énorme; elle est quelquefois d'un sixième de la substance que le grain devrait fournir aux hommes et ne le remplace que par un mince profit sur le son, demeuré plus gros et destiné à nourrir les bestiaux. Or, qu'il ne vaille pas mieux nourrir des hommes que des ani­maux, c'est ce qui ne saurait être mis en question." [A.Casanova. Techniques, société rurale et idéologie en France Ann. litt Univ. Besançon 1978 p 37].

Lorsque le seigneur respecte ses engagements, les réparations et les reconstitutions absorbent la plus grande partie du revenu.

La banalité nuit à la qualité de la mouture; Lavoisier va jusqu'à dire qu’elle fait manger une nourriture de mauvaise qualité à plus des trois quarts du royaume ; enfin, elle occasionne une perte d'au moins un sixième dans les farines que le mauvais moutage ne permet pas de séparer d'avec le son." [ibid].

La banalité, dans cette optique, aurait été un obstacle au progrès technique, la compression des frais de fonctionnement et le monopole garantissant un revenu stable au seigneur.

c L'intérêt du moulin banal pour le seigneur.

En France, la banalité aurait valorisé d'un cinquième environ le revenu du moulin. [Cl. Guindin in « Contribution à l'histoire de la Révolution française » p 178.] A l'éche­lon auvergnat, cette surévaluation due à la banalité, apparaît dans les baux à ferme : le montant des fermes des moulins banaux est nettement plus élevé que les fermes des autres moulins. C'est là que l'on trouve les records en matière de loyers : 1000 livres en 1761 pour le moulin banal des Martres, 1000 livres en 1776 pour ceux de Besse, 1012 livres en 1782 pour le moulin de St Floret, 74 septiers de grains en 1783 pour le moulin de St Cirgues - soit 74 quintaux, 730 livres en 1777 et 1786 pour le moulin de Pongibaud, 88 septiers de grains en 1784 pour celui de Montegret (88 quintaux). En comparaison, le montant moyen des taux à ferme des moulins de Billom au bureau de contrôle des actes, s'élève à 263 livres de 1761 à 1787 [A.D. P.D.D. C 4953]. Les baux des moulins banaux seraient 3, 4 et même 5 fois plus importants que ceux des moulins "libres". Ces baux tendent à augmenter en valeur au cours du XVIII° siècle : c'est le cas pour la Bretagne ["1789 les français ont la parole " par P Goubert et M Denis p 90], dans le Nord, à Maretz où le moulin banal rapporte plus à lui seul que les rentes foncières [G. Lefebvre : Les paysans du Nord pendant la Révolution française p 90].

En Auvergne, le mouvement semble identique : le moulin banal de Tallende a un loyer accru de 150 % entre 1680 et 1739, et de 134 % de 1739 à 1749 [A.D. P.D.D, 2 E 1059 5 E 38 DEP 519]. Le moulin banal d'Aubusson est baillé 25 % plus cher en 1786 qu'en 1773 [A.D. P.D.D. C 4956], le moulin de la Vie, paroisse de St Jean des Ollières, double son loyer entre 1756 et 1786, alors qu'entre 1740 et 1756, il était resté stable [A.D. P.D.D. 2E 328].

Un autre indice de la valorisation du moulin pour la banalité est fourni par...la suppression de la banalité. La réaction de la population est de déserter les moulins banaux pour se rendre dans des moulins mieux tenus, où la mouture est moins chère [en plus, il ne faut pas sous-estimer la part de la rancune dans cette réaction.]. Pour le meunier banal, c'est la catastrophe : ayant loué son moulin au prix fort, il travaille à perte. Ce schéma est commun à toute la France. Claude Gindin [Contributions à l'histoire paysanne de la révolution française p 184] cite l'exemple d'un meunier lorrain qui avait pris à bail emphytéotique pour 99 ans le moulin banal d'Autrecourt ; dès l'abolition de la banalité, les redevables exigent la mouture à demi-tarif ou vont moudre aux nouveaux moulins qui se sont édifiés. En Auvergne, à Tallende, les descen­dants du meunier banal, qui tiennent le moulin à rente annuelle et perpétuelle, se retrouvent exposés à la concurrence de 5 nouveaux moulins ; le rapport du moulin chute des trois quarts [A.D. P.D.D. Q 41 an VII]. A Royat, la perte de valeur est estimée également aux trois quarts. [A.D. P.D.D. L 3866].

Ce mouvement, pour frappant qu'il soit, reste circonscrit en Auvergne. La banalité apparaît peu dans les documents et surtout dans les cahiers de doléances auvergnats, car la banalité n'est pas une institution très répondue en Auvergne.

2em Partie : LE REGNE DU MOULIN HYDRAULIQUE « RUSTIQUE »

L'aspect technique ne peut être délaissé dans l'étude d'une machine comme le moulin car technique, économique et société sont étroitement liées. L'Auvergne présente au XVIIIè siècle des traits d'archaïsme dans presque tous les domaines -agriculture, "industrie", circuits d'échange -. Les moulins ne faillissent pas à la règle : construction et mouture rudimentaires, évolution très lente et circonscrite géographiquement, mais la province recèle une originalité, elle est vouée presque totalement au moulin hydraulique et surtout au moulin à roue horizontale.

I Typologie des moulins auvergnats

Trois traits caractérisent les moulins auvergnats : la prépondérance des moulins à eau, une majorité de roues horizontales et la petite taille des "usines".

A Le triomphe du moulin hydraulique

Il existe 2 sources d'énergie pour les moulins : l'eau et le vent. L'eau, l'Auvergne en est largement pourvue ; ce pays montagneux est sillonné de petits cours d'eau, ruisseaux, sources, torrents, propices à l'installation de nombreux moulins.Le vent souffle partout, il n'empêche qu'il est pratiquement impossible d'établir un moulin à vent en Auvergne.

L'Auvergne doit-elle déplorer cette absence de moulins à vent ? Ils auraient pu servir en cas de sécheresse ou de gel qui constituent les deux grandes tares des moulins hydrauliques, mais l'Auvergne est suffisamment pourvue en cours d'eau pour que les moulins à vent ne soient pas indispensables. Les moulins à vent n'apparaissent en masse que dans les régions privées de cours d'eau et possédant un régime de vents favorables comme la Basse vallée du Rhône, l'ouest et la Moyenne Garonne. (1) Allant par secousses, leur mouture est plus irrégulière que celle des moulins hydrauliques ; peu susceptibles de progrès techniques, l'avenir ne sera pas pour eux.

Cependant, ces faits révisent la représentation qu'on pourrait se faire des moulins auvergnats : ce n'est pas la poésie des ailes tournant sous le souffle du vent, la vision du moulin perché sur sa butte mais, au contraire, une construction banale, le plus souvent blottie au creux d'une gorge.

Si l'Auvergne ne comporte qu'une dizaine de moulins à vent, on en déduira que le moulin à eau y règne en maître :

- 391 tournants hydrauliques dans l'arrondissement de Brioude,

- 1967 tournants hydrauliques dans le département de Cantal,

- 1774 tournants hydrauliques dans le département du Puy-de-DÔme.

Soit un total de 4132 tournants à eau pour toute l'Auvergne. Mais attention ! Un tournant n'équivaut pas à un moulin car un seul bâtiment peut abriter plusieurs meules ; néanmoins les moulins auvergnats étant fort petits, nous pouvons conclure à un total de 2500 à 3000 moulins maximum en Auvergne au milieu de l'Empire. Faciles à installer, ils se sont tant multipliés que L.Gachon affirme, qu'en certains coins, le nombre des moulins correspond à celui des familles. [(1) Gachon : L’Auvergne et le Velay, p. 162].

L'Auvergne est arrosée par un réseau hydrographique important même s'il ne comprend qu'une voie navigable : l'Allier. Cependant, le régime des eaux n'est pas commode en raison de son irrégularité : l'Allier est capricieuse ; l'Allagnon, en crue lors de la fonte des neiges du Lioran, se retrouve parfois tellement à sec qu'on la passe à pied, d'une pierre à l'autre ; la Douze - qui passe à Issoire - a un cours très rapide comme la Monne, la Morge, la Sioule, le Sioulet, la Dore, la Dordogne, la Jordane, la Rhue, la Sumène.[(2) Ballainvilliers : L’état de l’Auvergne en 1765, p. 18-20]. Ordinaire affirme que les cours d'eau, bien entretenus d'octobre à juin, baissent tellement pendant les chaleurs qu'ils se retrouvent petits ruisseaux. (3)

Mais le moulin auvergnat s'est adapté à la situation et parvient à se contenter de fort peu ; aussi, la carte de répartition des moulins correspond assez bien à celle du réseau hydrographique : très nombreux dans le Cantal, moins dans le Puy-de-Dôme.

A l'intérieur d'un même département, on distingue des zones "blanches" comme la région d’Issoire. Il ne faut pas sous-estimer non plus l'influence de l'urbanisation sur le nombre de moulins.

B : la technique choisie : la roue horizontale avant la roue verticale

En Auvergne au XVIII° siècle deux types de roues dominent : la roue extérieure à aubes et surtout la roue horizontale. Mais à la fin du siècle et au début du XIX° siècle, un 3em type de roues se répand : la roue extérieure en dessous, à godets ou à coupes. L’enquête impériale de 1809 sur les moulins montre la répartition suivante.

Arrondissement Roues verticales Roues horizontales
Brioude 41 350

Mauriac

Murat

Saint-Flour

Aurillac

63

0

0

0

358

147

521

888
Total département du Cantal 63 1904

Clermont

Riom

Thiers

Ambert

Issoire

350

319

182

4

170

61

7

78

423

180
Total département du Puy de Dôme 1025 74

Soit un total pour l’Auvergne

1129 3003

Depuis, on est revenu sur ces considérations et en faveur du moulin à roue horizontale. C. Rivals justifie la perpétuation de ce moulin parce qu'adopté aux conditions naturelles, économiques et sociales et montre que, techniquement, c'est une machine qui a évolué. Il existe toujours une meule et une roue motrice tournant horizontalement aux deux bouts d'un même axe, un tour de roue correspondant toujours à un tour de meule ce qui exige, pour accélérer la rotation de la meule, d'améliorer la prise d'eau et pour accroître sa capacité de travail, d'augmenter le nombre de roues mais, un certain nombre de perfectionnements ont été apportés depuis les origines. Pour régler la mouture, c'est-à-dire l'écartement des meules, a été créé un système de commande par levier. La roue, que le courant actionnait en choquant ses pales d'un seul côté de l'axe, est placée au-devant d'un dispositif dirigeant sur les pales le jet sous pression de l'eau retenue derrière le barrage ; la mise en route et l'arrêt sont réglés par une vanne. Le nombre des pales a augmenté, leur disposition a changé : verticales au départ, elles s'inclinent par rapport au moyeu et deviennent obliques, puis elles se creusent et prennent l'allure de cuillères en bois. La technique de construction des moulins à roue horizontale n'a pas été figée.

Que ce soit MM. Leymarie, Jean Canard, J. Boithias et C. Mondin, tous semblent retenir la thèse de l'antériorité de la roue horizontale parce que plus simple et plus facile à installer.

Au 105èm congrès des sociétés savantes - 1980 -on conclut que "le moulin à roue horizontale préexiste à tous les autres, tout en se maintenant jusqu'à nos jours parce que, seul, il pouvait s'adapter aux situations les plus déshéritées". Cela explique sa localisation préférentielle dans les zones montagneuses, aux cours d'eau étroits, torrentiels, encaissés (cas de la région ambertoise et de la majeure partie du Cantal) mais cela n'empêche pas, dans la même province, sur des cours d'eau appropriés, d'utiliser les roues verticales, surtout les roues à aubes adaptées aux régions de basse altitude aux courants larges, aux eaux plus planes. Les roues verticales ne s'adaptent aux cours d'eau de montagne que par l'introduction des augets, innovation dont nous reparlerons. En attendant, le moulin à roue horizontale n'est pas une aberration et l'étude des moulins auvergnats permettra de montrer son adaptation au milieu géographi¬que, économique et social ; mais sur le plan purement technique, la prédominance des roues horizontales, conjointement avec le faible régime des cours d'eau, auquel elles sont adaptées d'ailleurs, influe sur la taille des moulins: en Auvergne, les moulins abondent, mais leur taille, c'est-à-dire le rapport entre le nombre de tournants et leur effectif, reste réduit et proche de l’unité.

C La taille des moulins

L'activité meunière en Auvergne est caractérisée par une dissémination en petites unités de production et une faible concentration qui n'est peut-être qu'apparente ; l'hydrographie et l'état embryonnaire du réseau de transports sont en bonne partie responsables de cet état de fait.

1) Des petits moulins

L'enquête de l'an II livre souvent deux chiffres : l'effectif des moulins dans une commune et le nombre de tournants dans chaque moulin. En principe, une seule roue, même verticale, n'entraîne qu'un couple de meules ; pour augmenter la capacité de production du moulin, il faut accroître le nombre de roues. Là encore, la confusion des termes est courante : souvent, ce qui est appelé "moulin" dans les textes n'est pas un bâtiment complet mais un couple de meules... on peut doubler ainsi le nombre de moulins.

Pour 86 lieux et 415 moulins, l'enquête donne le nombre de roues par moulin : 248 moulins n'ont qu'un tournant soit 59,76 % des moulins, 118 comportent 2 tournants soit 28,43 %, 33 tournent avec 3 roues c'est-à-dire 8 %, 10 ont 4 roues 2,41 %, 2 moulins comptent 5 virants 0,48 % et 4 jusqu'à 7 roues soit 0,96 %. La moyenne est de 1,59 tournants par moulin. Les deux tiers des moulins n'ont qu'un tournant et 88 % sont à 1 ou 2 virants.

M Leymarie a établi le même rapport tournants/moulins d'après le cadastre dans le Cantal (1835) : le rapport est de 1,835 dans 207 communes. Dans 14 communes du bassin d'Aurillac, la moyenne s'élève à 2,616 avec 73 moulins et 191 tournants et dans 29 communes montagnardes, le rapport tombe à 1,389 soit 296 roues pour 213 moulins. Pour l'enquête de l'an II d'ailleurs, la précision des réponses du district d'Ambert augmente sa part dans le total et fait chuter le rapport.

Les plus grands moulins - supérieurs à 3 tournants - étant l'exception, où se trouvent-ils ? A Ambert, ville où pas un moulin n’a un seul tournant, le cas le plus fréquent est représenté par 2 tournants dans chaque moulin, puis 5 moulins ont 3 tournants et même 2 moulins tournent avec 4 roues. Chadernolles compte 3 moulins à 3 roues, Vallorgues un. A Cournon existe un moulin à 3 roues, 1 à Rochelabouze, à Neschers. Il y en a 3 à Courpière, un à Espinasse et Aubusson et à Maringues, 3 à Clermont-Ferrand, 4 à Thiers, un à Neyronde, Puy Guillaume Chabreloche, aux Martres. Les moulins à 4 roues sont plus rares : Condat en possède 2, Clermont et Courpière 1. Rarissimes, les moulins à 5 virants : il s'en trouve 2 à Maringues qui a aussi un moulin à 7 tournants. Les moulins de Pont du Château auront jusqu'à 8 virants. A côté de cela 21 communes n'ont que des moulins à 1 tournant et la majorité des communes n'est peuplée que de mou¬lins à un ou deux virants.

Les plus grands moulins se situent davantage en plaine qu'en montagne et plus près des villes que des campagnes : l'exemple du Cantal le montre bien et les communes de Clermont, Cournon, Nescher, Courpière, Maringues, Thiers ont une majorité de moulins à deux roues au moins.

Les résultats de cette enquête peuvent être complétés en remontant le XVIII° siècle par des données des baux à ferme, des procès-verbaux, sources plus tendancieuses cependant : nous avons toutes les chances de trouver un rapport des tournants sur les moulins beaucoup plus élevé qu'en l’an II car les baux concernent des moulins assez importants, propriété de la bourgeoise, de la noblesse, des moulins supérieurs ou égaux à 2 virants risquent d'apparaître en plus grand nombre. Les documents donnent jusqu'à 115 moulins de toute l'Auvergne. Là dessus, 27 % n'ont qu'un tournant, 41 % en ont deux, 11 % trois roues et 11 % quatre roues. La moyenne est de 2,49 roues par moulin. Effectivement, ce type de documents tire la moyenne vers le haut. Il n'empêche que les moulins à une et deux roues font ensemble 68 % du total, même si les moulins à deux virants prennent la tête.

Ces documents font aussi apparaître davantage les moulins non fariniers souvent évacués dans les enquêtes : sur 286 roues, 17 sont à chanvre, 12 à draps, 7 à huile. A Clermont et Chamalières, les moulins sont presque tous exclusivement fariniers mais à Issoire, les moulins, souvent importants, ont plusieurs activités : celui des jésuites comprend trois roues à blé et quatre foulons à draps [(1) A.D. P.D.D.C2314] ; celui de Ripeyre, 4 roues farinières et un mail [(2)A.D.P.D.D.C6890], celui de la treille également [(3) A.D.P.D.D.C6890]. Les moulins de Saint Gai ont 2 meules à farine une à huile, une autre à chanvre et un foulon [(4) A.D.P.D.D.2 E 02775] ; à Massiac le moulin grand a 4 roues à blé, une à huile, une à chanvre et un foulon, le moulin petit 3 roues à blé et une à chanvre. (5) A St Martin des Plains [(6) [A.D.Cantal IIIE238 (24)], la Voulte (7) , Pontgibaud (8) [A.D.P.D.D. 5 E 22 DEP 496], la Vie (9) [A.D. P.D.D. 5 E 9 E P 2529] (paroisse de St Jean des Ollières) nous trouvons d'autres moulins complexes. Par contre, ceux de Dorinière à Aurillac [(1) A.D. Cantal III E 33 (42)] -(6 roues) ou, de Pont du Château [(2) E Montboissier liasses 13 c et 15] (8 roues) se consacrent, en dépit de leur taille, entièrement au grain.

La petite taille des moulins conduit inévitablement à leur prolifération si on désire une capacité de mouture suffisante. Cette abondance de moulins s'explique également par les difficultés des transports rendant les contractions irréalisables et par le réseau hydrographique qui ne permet d'installer que des moulins à faible capacité de mouture pour la plupart, la dispersion, périodiquement, n'est qu'apparente : les petits cours d'eau tarissent l'été et la population est contrainte d'aller aux moulins les mieux fournis en eau.

2) Un régime hydrographique capricieux

Hormis quelques rivières comme l'Allier, la Sioule, la majorité des cours d'eau sont des ruisseaux ou des torrents, insuffisants pour entraîner plus d'une roue quand ils ont de l'eau et inutilisables plusieurs mois par an pour cause de sécheresse ou de gel. La population a bien dû se contenter de petits moulins rustiques, peu coûteux et fonctionnant avec très peu d'eau.

a - A petits cours d'eau, petits moulins

L'enquête de l'an II sur les moulins révèle l'insuffisance de l'alimentation en eau. L'insuffisance de l'eau est quelquefois annuelle et il arrive que les moulins ne tournent que lors des crues. A Marsac, un moulin a été abandonné parce que les eaux qui le faisaient tourner n'étaient que pluviales [(1) A.D. P.D.D. L 2912]. A Auzelle, un moulin, sur un très petit ruisseau, ne moud qu'en hiver ou lorsqu'il pleut. Quatre des neuf moulins du Chambon sont situés sur les rives dont l'eau manque la plupart du temps. Les neuf moulins de la commune de Beurières utilisent trois petits ruisseaux qui ne permettent de moudre que lors des grandes eaux. Un moulin à Collange, ne va que trois ou quatre mois par an. A Lempty, on a bâti un moulin à deux tournants sur un ruisseau qui n'existe que grâce aux pluies. [(2) A.D. P.D.D. L 5559]. Les onze moulins d'Orléat "sont tous des moulins à moudre lorsqu'il pleut en été ou pendant trois à quatre mois en hiver parce que les eaux sont bonnes". Les ruisseaux qui les font aller prennent leur source dans la commune [(3) A.D. P.D.D. L 5559].

D'autres moulins, les plus nombreux, s'arrêtent une partie de l'année en raison du gel mais surtout à cause de la sécheresse. Ainsi à St Eloi les quatre moulins utilisent les eaux du ruisseau Modier, jusqu'à sec l'été. A Don l'Eglise, le ruisseau "le plus considérable peut fournir pour moulin deux tiers de l'année sans écluses et sur la rivière, il y en a quatre, les autres sont sur un ruisseau qui ne fourni de l'eau que pour la moitié du temps de l'année et le restant de l'année, il ne faut presque rien." Les six moulins de St Anthème sur un petit ruisseau manquent d'eau l'été ainsi que trois autres construits sur les sources. La moyenne de l'arrêt pour basses eaux est de 4 mois à Allire le pré. A Marsac, quatre moulins sur de petits ruisseaux cessent de moudre l'été. Huit moulins à St Bonnet le Bourg tournent par deux petits ruisseaux qui, hors des crues, nécessitent des écluses. Un moulin à St Clément est soumis aux caprices d'un tout petit ruisseau à sec l'été et en crue l'hiver. L'été, à Echandely, les petits ruisseaux permettent aux moulins de travailler la moitié du temps seulement.

La belle saison à St Amant Roche Savine mérite mal son qualificatif pour les moulins dont la moitié ne peuvent travailler que deux-trois heures par jour. A la Chapelle-Agnon, trois moulins utilisent un ruisseau à sec un tiers de l'an. Trois mois par an, l'eau manque au ruisseau de Gerise et de Grion alimentant sept moulins à BCtorgeron. Un seul ruisseau, considérable les deux tiers de l'an, mais à sec l'autre tiers, fait aller 5 moulins à Vertolaye. Les moulins de St just de Baffie sont presque tous placés à la source de petits ruisseaux et chôment deux mois par an. Dans la commune de Champtières, les moulins s'arrêtent l'été car les "rives" sont à sec. [(1) A.D. P.D.D. L 2912]. Sept moulins sur dix à Vollore chôment quatre à huit mois par an sur douze moulins de St Victor et Montvianeix, dix manquent d'eau : huit s'arrêtent quatre mois par an, un, six mots, et un neuf mois ! Cinq moulins à Maringues sont alimentés par le rassemblement de l'eau de petites sources et d'eaux pluviales et cessent six mois par an. [(2) A.D. P.D.D. L 5559]. A Manzat, deux moulins à la source de la Morge s'arrêtent cinq mois sur douze ; deux, aux sources d'un petit ruisseau, et un, sur le ruisseau de Manzat, ne vont pas six mois sur douze. Les sept moulins de Bromont sur de0 ruisseaux manquent d'eau un tiers de l'an. A la Fo/sest, G-sterfle, Giat, Soumarcheix, Chatelguyon, les petits ruisseaux connaissent de forts étiages. [(1) A.D. P.D.D. 1 MI 177 (RI)].

Sur quelques rivières plus importantes où des moulins à plusieurs tournants ont été édifiés, il est fréquent que deux tournants ne puissent fonctionner ensemble. Les moulins de Riom, pour la plupart à deux virants, ne peuvent faire mouvoir ensemble leurs roues car la chute et le volume d'eau sont insuffisants. [(2) A.D.P.D.D. idem]. Deux moulins sur la Dore, à Courpière, ne se servent que de deux roues au lieu de trois ou quatre l'été et quatre moulins sur le Couzon faisant dix tournants n'en utilisent que quatre l'été. [(3) A.D. P.D.D. L 5559]. A Viverols, un moulin à trois roues, sur le ruisseau de Ligonne, ne tourne qu'avec deux roues à la fois et un autre à deux tournants ne peut les faire aller que l'un après l'autre. [(4) A.D.PDDL 2912]. Les moulins des Farges, des Carmes, de St Cîrgues, du pont de Fontgiève et du pont de Naud à Clermont ne font marcher leur deux tournants que l'un après l'autre. [(5) A.D. 3866]. Dans la commune de Chadernolles, où onze moulins tournent grâce à un fort ruisseau, deux roues ne peuvent aller ensemble que six mois par an. Deux moulins de Marsalebre ne peuvent moudre en même temps car, quand un moud, l'eau manque à l'autre. Trois moulins d'Ambert à deux tournants ne peuvent travailler sous la même chute d'eau dans le même instant sauf en cas de besoin pressant ou lors des crues de septembre, octobre, novembre. [(6) A.D. P.D.D. L 2912]. Dans la commune de Thiers, la priorité accordée aux papetiers interrompt douze moulins sur la Durolle. [(7) A.D. P.D.D. L 5559].

L'immense majorité des moulins tournent par des petits ruisseaux comme le Modier à St Eloi, le ruisseau de St Amant à la Dore pour quatre moulins de la Chapelle Agnon, le Gerise et le Giron à Bptfgeron, le Ligonne à Viverols, la Tiretaine à Clermont, le Billon à Luzillat, la Page à Olmet, la Farge et Aubusson à Augerolle, la Darde, Laillyère, le Borbe, le Prudent et le Journis dans la commune de Thiers, le Bulhon à Bulhon, le Oavayat à Cellule, le ruisseau de Buron à St Prié Bramefont, Mons, Beaumont, Jussat, Bainazat ; un petit ruisseau venant du Bouquet paroisse de Loubeyrat sert aux communes de Teilhet, Prorapsat, Gimeaux. Citons encore le Veauze à St Georges de Mons, l'Aubene à Soumarcheix, l'Ardol à Singles, le Rigot à la Rodde.

Les étangs aussi font défaut l'été comme le Tix à St Avit, la Chaize à Fernoëlv le Dullonnet à la Celle. La faible quantité d'eau utilisable diminue le nombre réel des moulins en activité, leur capacité de mouture et une concentration temporaire de la meunerie s'effectue au profit de quelques dizaines de moulins qui bénéficient d'une véritable rente de situation.

b - Une concentration estivale

La plupart des villages ne peuvent compter une bonne partie de l'année, sur les moulins locaux. Lors des arrêts, les habitants sont contraints de se rendre dans des moulins plus grands, sur des rivières jamais à sec. L'étude des droits de mouture a révélé que les habitants de Lezoux, Beauregard, Billom recourent à des moulins plus éloignés. Le moulin de Neyronde sur la Dore ou celui de Pont du Château sur l'Allier attirent l'été toutes les populations alentours. Les habitants de Saint Germain la Montagne se rendent en août à des moulins que de plus gros ruisseaux font jouer. A St Bonnet le Bourg, durant l'été on se rend "aux grandes rivières". La population de Brugeron gagne le moulin de la Gilberte à Thiers, celle de St Just de Baffie fait moudre deux mois par an dans la commune voisine et, toute l'année, une bonne partie des villages au Nord de la commune vont moudre à Grandrif. Une partie de la commune de Champtières moud à Chambon, Marsac, Ambert, St Ferréol et les meuniers eux-mêmes se rendent aux moulins de ces communes l'été et en cas de gel. [(1) : A.O. P.D.D. L 2912]. Les quatre moulins de Cournon faisant neuf tournants sur le ruisseau d'Auzon, situés respectivement à 400 mètres, 900 mètres, 1,300 kilomètre et 1,600 kilomètre de l'Allier, servent aux habitants de Cournon, Dallet, Mezel, St Bonnet, Chauriat, Lignat, Cessat, St Georges, Laroche, Pérignat sur Allier et même Billom ! Dans la commune de Messeix, deux moulins sur la Dordogne sont les seules ressources des gens d'Avèze et de Singles en cas de sécheresse ; un moulin sur les rives du Chavanon sert aux habitants de Monestier et Merline (Correze). A St Amant (Tallende) la rivière est assez régulièrement fournie pour attirer du grain de douze lieues (46 kilomètres) ! [(2) A.D. P.D.D. L 3866].

Quelques communes ont la chance, à côté de petits ruisseaux aisément taris, d'avoir des rivières toujours pourvues en eau et même, revers de la médaille, très sujettes à inondation. A Pommeyrol St Pardoux, les cinq moulins tournent toujours. Les douze moulins de Novacelle ne sont jamais interrompus par le manque d'eau. Dans la commune de St Anthème, quatre moulins (sur treize) tournent grâce à un gros ruisseau ou une grande rivière. Deux moulins sur trois à Grandval sont bâtis sur un ruisseau assez considérable. Les quatre moulins de la Chapelle Agnon, installés sur le ruisseau de St Amant à la Dore ne manquent pas d'eau. A Marat, les ruisseaux sont petits mais ne tarissent pas. La commune d'Olliergues n'a qu'un moulin situé sur un ruisseau toujours pourvu en eau. Viverols a toujours le recours de deux moulins sur l'Ance, Trois moulins sur six à Rochefort ne manquent jamais d'eau. A Blanzat, 1'exmoulin banal, alimenté par le ruisseau de Bedat et des sources de St Vincent qui se réunissent à un quart de lieue de Sayat, ne s'interrompt pas.

Toute la commune de Messeix grâce à la Dordogne, le Chavanon, la Venière, ne connaît pas de problèmes de sécheresse, tout comme St Amant Tallende et St Cirgues (la Couze). Vollore a trois moulins sur treize qui vont toujours. Cropière a la chance d'avoir la Dore et le Couzon.

Les communes traversées par la Morge comme Maringues, St Hilaire, la Crôye, Apitonne, Obiat, Cellule, Mon.cej, Charbonnière les vieilles ne voient pas leursmoulins s'arrêter tous les étés. Cependant,dans quelques communes comme St Georges de Mons, Vitrac, Manzat, la Morge manque beaucoup d'eau l'été. La Sioule qui passe à St Georges de Mons, Pontgibaud, Bromont, Montfermy, Pontaumur, Landogne, Mirmont, St Jacques d'Ambur, St Pierre le Chastel, entraîne des moulins à deux tournants et plus et ne s'arrête pas. La Dore garde toujours assez de puissance et le moulin de Peschadoires n'est jamais retardé. Allier, Dore, Sioule, Morge, Dordogne permettent l'installation des moulins les plus grands et les mieux alimentés en eau, une vraie aubaine pour les meuniers qui jouissent d'un monopole de fait

Cependant la concentration ne s’effectue que quelques mois par an ; le reste du temps, les petits moulins bénéficient de l’atout de la proximité car les voies secondaires étant très mauvaises, les populations ne pourraient parcourir des lieues à la mauvaise saison, pour aller aux grands moulins. Le réseau hydrographique dense mais composé de petits cours d’eau explique beaucoup l’importance de la roue horizontale en Auvergne : elle se contente de très peu d’eau. L’autre avantage de la roue intérieure est de moins craindre le gel qu’une roue extérieure. Pour construire un moulin, les données naturelles sont donc essentielles.

CONCLUSION

Une province comme l'Auvergne détruit quelque peu l'image traditionnelle du meunier et du moulin : beaucoup de moulins communs, propriété d'une famille d'un village, peu productifs et surtout sans meunier, le personnage du meunier n'existe pas et le moulin n'a pas sa place conventionnelle dans la société rurale. C'est autour des moulins banaux que la relation meunier-communauté villageoise se développe le plus et c'est là qu'elle apparaît dans toute son ambiguïté : contraints de se rendre au moulin qui devient dès lors lieu de rassemblement - au contraire de ce qui se passe là où le meunier assure les transports - les villageois détestent et jalousent ce personnage qui use et abuse de son pouvoir avec la bénédiction de la justice seigneuriale.

Monopole de droit mais les monopoles de fait existent et se perpétueront : que penser de tous ces gros meuniers, installés sur les grandes rivières, et qui, seuls, sauront s'adapter à l'évolution technologique parce que l'eau est assez abondante pour alimenter un très grand moulin qui deviendra le seul économiquement viable, parce qu'ils ont assez de capitaux pour acheter le matériel qu'exige l'introduction des nouvelles moutures ?

Puissance économique - le revenu des gros moulins croît au XVIII° siècle -, l’assise sociale aussi; l'emprise des gros meuniers sur la communauté villageoise peut être forte, étouffante même mais peu de meuniers se trouvent dans cette position enviée.

Les auvergnats ne se plaignent pas de la spéculation sur les blés et farines mais beaucoup plus des mesures douteuses ou des tours de meules carrés, bref larcins de gagne-petits.... Avec des moulins qui s'arrêtent le quart de l’année, qui, lorsqu’ils ont de l’eau n’ont pas de chalands ou pas de grains, difficile de s’enrichir dans ces conditions.

On aurait pu imaginer, lorsque la pression démographique s’est accentuée, exigeant une augmentation des capacités de mouture, une concentration de la meunerie, mais le contraire s’est produit.

Moulins petits, vite bâtis, vite démolis mais aussitôt reconstruits, les communications très difficiles, la routine, expliquent cette réaction. Le petit moulin à roue horizontale n'a peut-être jamais autant proliféré qu’au XVIII° siècle, mais dès le début du siècle suivant, son déclin s’amorçait.

Pour illustrer le texte précédent nous donnons les illustrations de différents moulins d’altitude , illustrations provenant du Cantal.



III. Les moulins de Lieutadès, Cantal (A et L. Le Bail)


LES VIEUX MOULINS DE LIEUTADES

A. et L. LE BAIL

Illustration Couverture

Etaient-ils anciens ? Pas tous, probablement. Jusqu'au 18ème siècle, la paroisse de Lieutadès était partagée entre deux seigneuries : celle de Séverac-Viadène, et celle des moines-soldats de la Garde-Roussilhon. Ces moines, les Chevaliers de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem (Ordre de Malte), possédaient à la Garde, comme dans beaucoup d'autres lieux en France, une grosse exploitation agricole, avec une tour et une chapelle. La Garde était une annexe de la Commanderie de Montchamp, près de Saint-Flour, elle-même dépendant de la «Langue d'Auvergne» de l'Ordre. Ils étaient propriétaires des deux moulins du Temple, à Jabrun (Maisonneuve). Pourquoi du Temple ? Au début du 14ème siècle, le roi Philippe le Bel, inquiet de la puissance des Templiers (autre ordre de moines-soldats), les avait persécutés, avait confisqué leurs biens qu'il avait donnés en 1312 à l'Ordre de Malte. Les moulins du Temple ont dû faire partie de cette confiscation.

Les Moulins du Temple étaient des moulins banaux : les gens des environs étaient tenus d'y faire moudre leur grain, moyennant finances bien sûr. Des documents anciens nous le disent :
Le 15 septembre 1786, Pierre Passenau et Estienne Bougés, ou Boughès, de la Garde, doivent se reconnaître sujets de l’ « illustrissime et puissant seigneur Frère Paul Félines de la Renaudie, chevalier et maréschal de l'ordre saint Jean de hyeruzalem, commandeur de Montchamp et de la Garde-Roussilhon». Estienne Boughès, entre autres devoirs, est « tenu et obligé de faire moudre ses grains aux moulins banaux del Templé au dit seigneur appartenants, et y paier la mouluge accoustumé à paine de confiscation desdits grains estant surpris en contrevention» (Archives du Cantal)

Un autre acte montre qu'il en allait de même pour d'autres villages. « Guillaume Vaissade jeune, Guillaume Vaissade vieux, François Vaissade son fils, et Jean Gros Fils à Feu François, laboureurs habitants du village de la Gravière parroisse de Jabrun, et marie Ventuéjoul veuve de Gérard Pécoul habitants du village de Boissière parroisse de Chaudesaigues» sont soumis aux mêmes devoirs. (5 juillet 1786).

Lorsque l'éloignement ne permettait pas d'aller aux Moulins du Temple, le village pouvait avoir son propre moulin, mais il fallait payer un droit au seigneur « propriétaire » du ruisseau.

7 juin 1662 : « Antoine Girbal bisson, fils à (?), Piobat Vachayrès Fils à Feu Antoine, laboureurs habitants du village de Lausier parroisse de lioutadès, diocèze de St Flour, lesquels de leur bon gré et bonne volonté ont recognu, confessé avoir de tout temps et d'ancienneté, eulx, leurs autheurs et prédécesseurs, tenu, jouy et possédé, et devoir encore tenir, jouir et posséder (...) de illustre et puissant seigneur Frère Jean-Jacques de la Rochefoucauld, chevalier de l'Ordre de St Jean de Jérusalem, commandeur de Montchamp, (...) la Garde-Roussilhon, (...) la permission de prendre l'eau du ruisseau appartenant audit seignieur appelé del lénot pour se mouldre leur mollin appelé del laussier » moyennant un cens annuel de 4 cartons d'avoine (45 kgs environ) qu'ils doivent porter au grenier du seigneur chaque Saint-Matthieu.

Ces actes, appelés « reconnaissances amphitéotiques » en Auvergne, « aveux » en Bretagne, coûtent cher au laboureur qui doit payer l'homme de loi qui les rédige. Celui-ci est souvent maître Jean Albaret, greffier de la seigneurie, qui demeure au manoir du Brusquet, en Jabrun, près de la Moulette.

Il semble que les moines-soldats aient peu à peu abandonné la Garde, au 18ème siècle, et que Lieutadès ait été débarrassé de ces nobles personnages. En effet, en 1758, c'est Jean-Jacques Albaret, demeurant au Brusquet, descendant de l'homme de loi des moines, qui se dit : « seigneur de Monteausson, Lieutadès, la Garde-Roussilhon, la Moulette et autres lieux ».

Peut-on penser qu'à cette époque, l'obligation de faire moudre au moulin banal est tombée en désuétude, et que les villageois ont trouvé plus intéressant d'avoir leurs propres moulins ? Quelques années plus tard, la Révolution devait supprimer officiellement banalités et autres droits féodaux.

FICHE TECHNIQUE

De nombreux moulins existent encore ; leurs ruines présentent toutes un certain air de famille. Le moulin est petit. Il s'élève le plus souvent sur deux niveaux : la chambre des meules, et au-dessous, une cave (voûtée en pierres ou couverte d'un plancher) dans laquelle l'eau actionne la roue, toujours horizontale. Seuls trois moulins comportent trois niveaux et une partie habitable : la Combe, le Verdier, le Ferrand. Au niveau supérieur de ces derniers, on trouve les instruments actionnés par la roue : treuil pour monter les sacs de grains, tamis à farine (le blutoir).

Ici : illustration : Schéma 1 : Moulin à 3 niveaux (LeVerdier)

L'eau est captée à une distance variable en amont, selon la pente, et arrive au moulin par un canal d'amenée, le bief ou béal ; (on dit aussi l'agal ; à Mauriac, c'est le scourailloux ; ailleurs, l'escourial, l'estourridou). A Cabrillade, pas besoin de béal ! Le moulin est bâti au milieu d'une grosse cascade ; au moulin de Mistre, le béal mesure plus de cent mètres. Si le débit du cours d'eau est trop faible, une digue en retient l'eau dans un étang, comme au moulin de la Garde.

Lorsque la dénivellation n'est pas très prononcée, on relève la prise d'eau par un barrage : la chaussée, ou caussado, ou paissaire, peschère. Le canal peut être muni de vannes (tompo, estompo) permettant de régler le débit de l'eau. Le moulin de Mistre, à l'Hermet, conserve encore, pratiquement intact, son système d'alimentation.

Ici illustration Schéma 2 :Moulin à 2 niveaux (Fourneirou)

LES MEULES

Les meules encore visibles à Lieutadès, ont différentes origines :

la meule monolithe, en pierre du pays (granité de la Margeride à gros éléments de Feldspath), relativement mince (12 cm). Diamètre : 125 à 130 cm (Moulin du Laussier);

Illustration Meule 1 et Meule 2 : Meule en granite du moulin du Laussier

la meule en silex, formée de plusieurs blocs d'un calcaire très chargé en morceaux de silex, ajustés et doublement cerclés de fer, de même diamètre mais plus épaisse (22 cm) (Moulin du Verdier).

Illustration Meule 3 et meule 4 : Meule de silex du moulin du Verdier.

Il existait aussi des meules en basalte, en quartz. Elles venaient de plus ou moins loin : aux environs de Lieutadès, une parcelle portait le nom de « Peyre Moulière » : la roche y était-elle propre à tailler des meules ? Monsieur LEYMARIE écrit qu'on a trouvé des traces de taille aux rochers de Turlande.
Le chemin de fer a permis l'arrivée des meules de Champagne en silex. Celles du Verdier venaient de la Ferté-Sous-Jouarre, entre Paris et Reims, dont les carrières devaient fournir toute la France, voire l'Europe (Ecosse.....).
Pour permettre l'écoulement du grain et de la farine, les meules sont rainurées, obliquement par rapport au rayon, sur une face, ce qui a aussi pour avantage de diminuer réchauffement dû à la friction. Périodiquement, il fallait, au marteau, au burin, refaire ce rainurage : c'était le rhabillage de la meule, très dangereux pour les yeux, surtout avec les meules de silex dont les éclats étaient particulièrement acérés.

Les moulins importants, comme le Verdier, possédaient un treuil actionné par la force de l'eau qui permettait de soulever la meule supérieure, et de la retourner pour le rhabillage : une meule doit peser de 500 kg à une tonne. Le profane peut reconnaître assez facilement les deux meules d'une installation, même lorsqu'elles sont isolées (elles font de superbes tables de jardin). La meule inférieure (gisante, dormante) est percée d'un trou rond par où passait l'arbre. Un manchon de bois garni d'étoupe graissée assurait l'étanchéité au grain. La meule supérieure (tournante, mouvante) est taillée, en son centre, d'un trou allongé destiné à recevoir une pièce essentielle, l’anille, qui la rend solidaire de l'arbre. Sans l’anille, impossible de faire tourner la meule supérieure. Pour punir un meunier, il arrivait qu'on lui confisquât ses anilles.

LA ROUE (ROUET - ROUDET)

Elle est toujours horizontale, à Lieutadès. La roue horizontale est celle du Sud de la France ; la roue verticale, celle du Nord et de l'Ouest. A la différence d'une roue verticale munie de pales ou d'augets, la roue horizontale est pourvue de «cuillères» pour capter efficacement la force de l'eau. Cependant, le rouet horizontal n'a qu'un rendement assez faible : 35 % de la puissance de l'eau, et encore, s'il est métallique (déjà bien meilleur que le rouet en bois). La roue verticale, surtout si elle a des augets, atteint un rendement de 60 %. L'eau arrive sur les cuillères par le «coursier», ou « chêneau », canalisation en bois, inclinée et resserrée à la sortie pour augmenter la vitesse de l'eau. On règle le débit au moyen de la « pelle », vanne actionnée par le meunier de l'intérieur du moulin.

Le rouet et la meule tournante sont rendus solidaires par un arbre, mi-bois, mi-métal. Cet arbre, à sa partie inférieure, tourne dans le creux d'une pièce de fer (la crapaudine) qu'il use. On rattrape cette usure en faisant reposer l'axe et la crapaudine sur un levier. Ce dernier est mobilisé depuis l'étage des meules, ce qui permet, par le même moyen, de régler l'écartement des meules.

PETITS ET GRANDS MOULINS

Le cadastre ayant été établi pour servir de base au calcul des impôts locaux, nous pouvons savoir quelle était l'importance relative des moulins à Lieutadès, en 1834 :

• Le moulin du Verdier avait un revenu estimé à 20.00 F • Le moulin du Ferrand : 18.00 F • Le moulin de la Combe : 16.00 F • Le moulin du Laussier : 10.00 F • Le Moulé (vieux moulin du Laussier) : 10.00 F • Le petit moulin du Ferrand : 10.00 F • Le moulin de Mistre, à l'Hermet : 8.00 F • Le moulin de Fourneïrou, au Verdier : 3.00 F • Le moulin d'Estourniès devait être double, une partie avait un revenu estimé à 2.00 F et l'autre à 0.02 F • Le moulin de la Garde, qui ne fonctionnait sans doute que très épisodiquement, avait un revenu estimé à 0.02 F

Nous retrouvons donc nos onze moulins en état de marche. Pour conclure cette section : illustration du cachet de fabrique d’une meule provenant de la Ferté-sous-Jouarre et installée au moulin du Verdier.

IV. Les moulins de Marcolès, Cantal (Y. Souquières, C. Souquières et M. Croute)


Localisation des Moulins de Marcolès (extrait du Chapitre 5).

Le Cantal est drainé par de nombreux cours d'eau plus ou moins importants et les moulins à eau furent nombreux, leur nombre était estimé au millier à la fin du XVIIIème siècle. Il s'agissait le plus souvent de petits moulins faisant vivre une famille et servant une communauté restreinte.

Ce sont des bâtisses en pierre situées sur les cours d'eau ou plus généralement près d'une retenue artificielle ou étang créé à partir de la rivière. Le système de mouture, composé de la trémie et du coffre des meules se situe au rez-de-chaussée, la roue sous le moulin. La chute d'eau entre la retenue et la roue est, suivant la position du ruisseau ou de la retenue, d'environ 2 à 3,5 mètres. Pour les moulins les plus importants, la maison d'habitation était attenante ou à proximité immédiate du moulin.

L'activité du moulin étant insuffisante pour faire vivre la famille, les meuniers de Marcolès étaient aussi fermiers ou cultivateurs, jouissant de terres ou cheptel que le propriétaire du moulin avait inclus dans le bail du moulin, quand ils n'étaient pas propriétaires.

Recensement des Moulins de Marcoles (extrait du Chapitre 7).

Cette étude a recensé 35 moulins. Le plus ancien a été identifié par un acte de 1452, il s'agit d'un des deux moulins de Teulade. La majorité des moulins retrouvés, excepté les plus importants qui ont traversé les siècles, étaient anciens, en général en fonctionnement avant le XVIIème et XVIIIème, ces moulins fonctionnaient pour une famille ou une communauté d'habitants. De chaque village des accès conduisaient à un petit moulin situé sur le ruisseau avoisinant dans des endroits souvent reculés des grandes voies de communication.

Les moulins les plus importants de la commune sont les moulins de Gazes, du Talarau, de La Bouygue, de La Morétie auquel il faut ajouter le moulin de Souquières qui daterait du milieu du XVIIIerre et qui a peut-être remplacé celui de Canhac.

Ces moulins ont connu une forte activité au XIXème, voir au début du XXème siècle, les meuniers travaillaient pour plusieurs paysans et villages. Le bourg de Marcoles était sans doute pourvu en farine par les moulins du Carmentraire, du Talarau et de La Bouygue. Ils ont cessé leur activité au cours du XXème siècle, certains ont été démolis, d'autres dont la bâtisse était en bon état, ont été transformés en maison d'habitation ou en gîtes ruraux.

La presque totalité des moulins identifiés, était destinée à la mouture des céréales (froment, seigle, blé), seuls trois moulins servaient à des activités manufacturières : 2 moulins à tan pour les ateliers de tannerie de Marcoles et un à foulon. Au moins deux moulins étaient équipés en complément des meules à céréales, d'une paire de meules à huile. Le moulin qui a arrêté le plus tardivement son fonctionnement est le moulin haut de Gazes en 1970. Son mécanisme est le seul à avoir été restauré et à pouvoir encore fonctionner.

Transcription d’un acte du Notaire Boyssou, Marcoles –AD 3E 252 201 (Quittance du scieur de long pour la reconstruction d’un moulin. 3 avril 1797).

Aujourd’hui, quatorze germinal an 5 de la Rep française une et indivisible, après midi, ou bien en vieux style le 3 avril 1797, au lieu et Commune de marcolès, en l’étude et par devant le not. Public et témoins soussignés, fut présent jean clémengea, majeur garçon, scieur de long originaire de la Commune de chassignole département de la haute Loire, le présent travaillant en ce païs, lequel a par les présentes déclaré avoir ci devant ou présentement reçu en espèces métalliques du citoyen pierre Felgines cultivateur habitant du lieu de Carmentraire de cette commune ici présent et acceptant la somme de cent vingt livres pour façon de planche à raison de vingt cinq sols la toise faite par le dit Clemengea pour le compte dudit Felgines pour servir à la reconstruction d’un moulin que ce dernier fait faire, dont il le quitte pour l’avoir reçu des deniers propres et particuliers dudit pierre Felgines dont il le quitte sauf son recours. Ainsi ledit voulu fait lu et passé en présence de jacques tafanel et guy liaubet journaliers de ce lieu qui ont signé avec moy, les parties ont déclaré ne savoir signer de ce requises

Boyssou, notaire public

Enregistré au le 19 Germinal an 5 de la Rep

Note : si la livre vaut 12 sols, 120 livres = 1440 sols
Prix de la toise 25 sols, donc 1440 / 25 = 58 toises
Mais la toise vaut 3,8 m2 soit
La surface débitée est donc de 219m2